Le système éducatif Camerounais se subdivise en deux sous-systèmes, le sous-système anglophone et le sous-système francophone. Dans chacun de ces sous-systèmes, l’apprenant a le choix entre l’enseignement général, l’enseignement technique, et, récemment l’enseignement professionnel.
Selon l’article 7 de la loi d’orientation de l’éducation au Cameroun, « l’État garantit à tous l’égalité de chances d’accès à l’éducation sans discrimination de sexe, d’opinions politiques, philosophiques et religieuses, d’origine sociale, culturelle, linguistique ou géographique ». Ceci revient à dire que tout parent, quel que soit l’endroit où il se situe sur le territoire Camerounais, devrait pouvoir choisir, librement, quel sous-système et quel type d’enseignement il veut pour sa progéniture. En pratique, la tâche est moins aisée qu’on le voudrait à cause de la répartition inégale des établissements scolaires sur le territoire national.
Le sous-système anglophone en minorité
Les chiffres le démontrent, les établissements qui proposent le sous-système anglophone sont très peu nombreux au Cameroun, notamment dans la zone francophone. Selon les données disponibles, les établissements bilingues (qui offrent les deux sous-systèmes) constituent seulement 13% du total des établissements scolaires publics.
Ce pourcentage est d’autant plus bas que les rares établissements bilingues présents en zone francophone se retrouvent en majorité dans les grandes métropoles où la possibilité d’avoir des établissements privés bilingues est plus élevée. Les zones rurales, par conséquent, sont sevrées de ce sous-système, ce qui ne laisse pas aux parents le choix de l’éducation qu’ils veulent pour leurs enfants.
L’égalité d’accès à l’éducation est un droit bafoué par la mauvaise répartition des établissements scolaires sur l’étendue du territoire, forçant de ce fait les parents à envoyer leurs enfants dans un sous-système ou dans l’autre.
L’enseignement technique lésé
Pendant des années, l’enseignement technique a été considéré comme le système où l’on envoie les apprenants peu brillants, ainsi que ceux, trop âgés, qui ne peuvent plus intégrer l’enseignement général. Ce préjugé a-t-il découragé la création de lycées techniques ? Difficile à dire. Toujours est-il qu’il y a seulement 35.59% d’établissements techniques au Cameroun, et ce malgré l’apparent désir des pouvoirs publics de professionnaliser notre enseignement.
Le nombre réduit d’établissements techniques pose également le problème de choix au moment de faire entrer un enfant au secondaire. Mais ce n’est pas le seul problème. Il existe des établissements secondaires d’enseignement technique dépourvus de matériel ou d’ateliers. Nous avons récemment visité un de ces établissements. Ils avaient, bel et bien des ateliers et quelques machines, mais, disait le proviseur, les compteurs installés au lycée n’étaient pas assez puissants pour supporter les machines présentes dans les ateliers, ce qui les rendait inutilisables, pénalisant par la même occasion les apprenants de cet établissement.
La professionnalisation effective des enseignements passe forcément par la multiplication des établissements d’enseignement technique, autant dans les villes que dans les zones éloignées, pour que chaque parent puisse donner à sa progéniture la chance d’apprendre un métier dès le secondaire. Ensuite, une répartition équitable des établissements sur l’étendue du territoire sera indispensable pour donner à chaque jeune les mêmes chances de réussite sociale.
Le clivage linguistique flagrant
Le phénomène que nous avons observé en zone francophone en ce que concerne le sous-système anglophone est également vérifiable, à quelques chiffres près, en zone anglophone avec le sous-système francophone : peu d’établissements bilingues existent, et le reste des établissements offre un seul sous-système, celui correspondant à la langue dominante dans la région.
Cela amplifie le fossé linguistique, et non seulement ne contribue pas à la consolidation de l’unité nationale tel que stipulé dans l’article 3 de la loi d’orientation de l’éducation au Cameroun, mais aussi et surtout peut être à l’origine de grave troubles sociaux – ou servir de prétexte pour de pareils troubles – comme c’est déjà le cas de la crise qui sévit actuellement au Cameroun.
Améliorer l’accès à l’éducation pour tous
Améliorer l’accès à l’éducation ne se limite pas seulement à créer des établissements scolaires – parfois dépourvus d’infrastructures et de personnel qualifié – à tout bout de champ, comme notre gouvernement semble le croire. Il faut également penser à donner à chaque jeune camerounais la possibilité d’accéder librement à l’éducation qui lui convient le mieux, et ce sans avoir besoin de trop s’éloigner de son lieu de résidence. Autrement, on aura limité son droit à l’éducation, ce qui est inadmissible.
Photo d’illustration : Arne Hoel/Banque mondiale